Tu es née l'année où sombra le Titanic
Deux grands yeux bleus centraient un visage angélique
Ouverts sur le monde que tu découvrais à peine
Tu devins dès lors pour tes parents leur reine
Jules et Marie venaient juste de se rencontraient
Ta mère, veuve du premier mari épousé
Alla voir Jean, son père qui s'opposa farouchement
Ils se marièrent dès lors, sans son consentement
C'est à La Pinière qu'ils commencèrent à t'élever
Votre bonheur à trois fut malheureusement de courte durée
Puisque la Première Guerre venait juste d'éclater
Et ton père sous les drapeaux fut appelé
De Tigny dans l'Aisne, il ne revint jamais
Faisant de toi, une pupille de la nation, Mémé
Ta vie se déroula dès lors cahin cahan
Et tu mis au monde sept merveilleux enfants
C'est dans ta maison à Grandchamps que je venais
Pour y passer ce qui à mon souvenir restent mes plus beaux étés
Te souviens-tu de la biquette qui ne voulait pas rentrer ?
Et du chien, du bâton, et du feu pour aider le berger ?
Moi je me souviens de tes histoires racontées
Juste avant qu'on aille se coucher, ou à la veillée
Je me souviens de ces marrons grillés sur le feu de bois
Et de cette joie qui émanait facilement de toi
Je me souviens aussi de cette fin d'été
Où on m'a appelée pour me l'annoncer, Mémé
Et même si quatorze ans se sont déjà écoulés
Tu resteras toujours au creux de mes pensées
Il y a tant de choses sur toi que j'aurais voulu apprendre
Tant de choses sur la famille que j'aimerais comprendre
Tant de regrets, de mots ou de faits que je n'ai pas effectué
Et qui maintenant sont trop tard car tu n'es plus à nos côtés
C'est à toi que je pense quand j'écris
Toi de qui j'ai dû hériter mon imagination
Qui sans nul doute a sauté une génération
Toi, Mémé, qui aurait eu cent ans aujourd'hui
Et c'est sur ta tombe que j'irais me recueillir
En ce jour où s'amoncellent tant de souvenirs
Et c'est sur ta tombe que je déposerais ces quelques mots
En espérant au fond de moi que tu les entendes de là-haut